Mettons un terme à la dépossession du bien éolien commun

Photo: Olivier Zuida Archives Le Devoir.
Le développement éolien au Québec a largement été confié au privé, constate l’autrice.

Rachel Fahlman
L’autrice est conseillère municipale à Saint-Zéphirin-de-Courval. Elle cosigne cette lettre avec une vingtaine d’élus et d’ex-élus municipaux au nom de Vent d’élus.*

Mettons un terme à la dépossession du bien éolien commun

Le développement éolien au Québec a largement été confié au privé : c’est un détournement de fonds publics qui doit être dénoncé et corrigé.

Nous lançons donc un appel à la Fédération québécoise des municipalités (FQM), à l’Union des municipalités du Québec (UMQ) et à tous leurs membres d’agir rapidement en arrêtant de cautionner ce détournement de fonds publics et la dépossession du bien commun au profit de l’industrie éolienne privée.

En cautionnant la production d’électricité par le privé et la poursuite de partenariats public-privé, nous, élus municipaux, soutenons activement un recul historique en regard de la nationalisation de l’électricité. Ce recul n’est pas qu’idéologique : il entraîne une perte d’expertise technique et scientifique sur le plan de la production d’électricité et un appauvrissement collectif sur le plan économique.

Une récente étude de l’Institut de recherche en économie contemporaine (IREC) confirme cette affirmation et démontre que la population québécoise a dépensé plus de six milliards de dollars pour accorder la priorité à l’énergie éolienne privée et dépenserait jusqu’à 22 milliards d’ici 2035. Cette perte doit être évitée en priorisant une planification énergétique basée sur les besoins de la population plutôt que sur des intérêts privés, et en confiant la production d’électricité éolienne à Hydro-Québec.

Dans sa conclusion, l’étude souligne que même si certaines municipalités profitent d’une partie de la rente éolienne, une question de fond se pose : « Qui sont les réels bénéficiaires de cette privatisation ? » Si les municipalités étaient partenaires à 50 % avec Hydro-Québec plutôt qu’avec les promoteurs, « les revenus pour chaque partie en 2023 auraient pu être compris entre 450 M$ et 840 M$ et devraient atteindre entre 910 M$ et 1,70 G$ à l’horizon 2035 ».

De tels manques à gagner ont un impact majeur sur les finances publiques et ainsi sur la capacité de l’État à procurer des services de qualité à ses citoyens. Sans compter qu’à ces déficits économiques s’ajoutent le prix à payer pour les transformations du paysage et les nombreux conflits d’usage et impacts sur les populations riveraines, telles la division sociale, les diverses nuisances, la perte de qualité de vie qu’entraîne un tel développement de la filière éolienne en milieu habité.

La FQM et l’UMQ offrent des services d’accompagnement payants aux MRC afin que ces projets éoliens s’implantent sur leur territoire. Ces services poursuivent la même finalité que celle du gouvernement provincial : octroyer une plus grande place au privé dans la production d’électricité au Québec.

Cessons d’accepter ce modèle de développement énergétique par décrets ! Passons à l’action et exigeons une politique globale de développement énergétique du Québec dans sa lutte aux changements climatiques. Dans son Plan énergie, l’UMQ nous invite à être « ambitieux pour nos communautés et pour les générations futures. Au Québec, dans nos municipalités, nous avons tout ce qu’il faut pour nous démarquer et devenir un modèle de développement économique durable ».

Nous invitons donc l’UMQ et la FQM à être à la hauteur de telles ambitions ! Le modèle de développement économique que constitue la privatisation de la filière éolienne n’est pas durable et ne bénéficie qu’à quelques-uns au détriment du plus grand nombre.

Il n’est jamais trop tard pour agir ensemble pour le bien commun de la population québécoise : l’avenir de nos communautés et des générations futures en dépend.

*Ont aussi signé cette lettre : Diego Scalzo, maire, Warwick ; Denise Gendron, mairesse, Sainte-Monique ; Gaétan Ruest, ex-maire, Amqui ; Sylvain Laplante, ex-maire, La-Visitation-de-Yamaksa ; Isabelle Clément, conseillère municipale, Hérouville ; François Rousseau, conseiller municipal, Saint-Léonard-d’Aston ; Sylvain Pillenière, conseiller municipal, Lotbinière ; Roman Pokorski, conseiller municipal, Saint-Adelphe ; Stéphane Vincelette, conseiller municipal, Saint-Elphège ; Martine Bechtold, conseillère municipale, Saint-Wenceslas ; Christiane Bonneau, conseillère municipale, Saint-Camille ; Céline Dumas, conseillère municipale, Warwick ; Jules Bédard, conseiller municipal, Saint-Jacques-le-Majeur ; Pascale Boislard, conseillère municipale, Saint-Albert ; Myriam Normandin, conseillère municipale, Saint-Elphège ; Jean-Pierre Ducruc, ex-conseiller municipal, Sainte-Croix ; Claude Charron, ex-conseiller municipal, Vianney ; Alain Ayotte, ex-conseiller municipal, Hérouxville ; Alain d’Auteuil, ex-conseiller municipal, Drummondville ; Michel Veilleux, conseiller municipal, Sainte-Monique.

Précédent
Précédent

Une planète pour vos enfants

Suivant
Suivant

Renoncer graduellement au gaz à meilleur coût